Ils sont deux. Deux Camerounais, à coté d'un Marocain, un Congolais, un Français. Ils sont trois journalistes: un Français et deux Camerounais. Le sujet est le Cameroun et sa capacité d'honorer ses engagements en 2021, en organisant la CAN.
Les deux Camerounais transpirent le parti pris, tout journalistes qu'ils seraient. Nous sommes à Paris, en 2020. C'est de ce type de journalistes-là que la France est encore friande, s'ils sont Africains. Ils n'ont plus revu leur terre natale depuis des années. Du moins l'un des deux, jadis animateur spécialisé dans la propagation des rumeurs, doué du lexique typique de l'élève entré en série littéraire comme dans une chambre funéraire. Mongo Beti en son temps fustigeait cette France rance, accrochée à une Afrique hors sol, bien attachée, par quelques Africains bien choisis pour cela, à des stéréotypes désuets.
L'ancien animateur est à Paris devenu journaliste. Il a la peau plus bigarrée qu'à Yaoundé. Il a le même verbe: celui de l'élève de série littéraire vomi par toute chose littéraire. Le cancre, l'imposture brillent dans son expression, dans sa logique vermoulue de Camerounais médiocre, Camerounais bien de son temps, c'est-à-dire aussi médiocre que sans vergogne lorsqu'il s'agit d'exprimer toute cette médiocrité.
Il parle de son pays natal, qu'il n'a plus vu depuis dix ans au moins. Il parle des réalisations de ce pays en vue de l'an prochain. Il reste l'élève de série littéraire tout à fait raté qu'il fut. La logique l'a toujours aveuglé. Il parle d'un avocat décédé cette semaine. Se fait reprendre par son volubile compatriote, qui souhaite le voir concis et poser sa question.
Le Congolais, de ces trois hommes, est le seul qui a visité le Cameroun récemment. Il y était encore hier. Il a pu visiter toutes les infrastructures à aboutir pour réussir une coupe d'Afrique de foot. Il a dit qu'à ce jour, les travaux en sont à quatre-vingt-dix-neuf pour cent d'achèvement. Il a relevé le dynamisme des Camerounais qui ont déjà fourni davantage que le parc hôtelier nécessaire. Tout cela a le don de ne pas contenter notre animateur de Yaoundé, promu journaliste à Paris par une carte de réfugié politique. Il émet donc des doutes, quant à ce qu'il ne pourrait pas aller voir lui-même.
Le Congolais de lui répondre en substance ceci : " (...) Je pense qu'il faut mettre un terme à ce pessimisme.Il y a une Afrique qui avance, et quand vous l'analysez à partir de l'extérieur, peut-être que vous ne vous rendez pas compte des réalités sur la situation des choses. Moi je vous parle de ce que j'ai vu. Ce n'est pas ce qu'une certaine presse, qu'elle soit d'une ligne éditoriale contre ou pour le pouvoir, peut raconter.
Je viens du Cameroun, je suis arrivé ce matin. Je viens du Cameroun, j'ai conduit une délégation, j'ai fait Yaoundé, Douala, Bafoussam et Garoua, J'ai vu les réalisations, je peux vous dire que vous devez être fier d'être Camerounais, d'avoir ce que moi j'ai vu comme infrastructures. Les pelouses que j'ai vues là, au jour d'aujourd'hui, c'est des pelouses standard même coupe du monde que le Cameroun va fournir.(...) Donc je pense que vous devez être fier plutôt que d'être pessimiste."
Ainsi va le monde, un dimanche soir sur les bords de Seine, lorsqu'un certain exil lance un regard à la rivière des crevettes.
Ada Bessomo.
Illustration: Justin Ebanda Ebanda