jeudi 9 septembre 2021

Coup d’Etat en Guinée : dans la tête de Mamady Doumbouya.

Comment naît, grandit et se réalise un projet de coup d'Etat dans son pays quand on est un guinéen, militaire né en 1980 ?

La Guinée est un pays francophone d'Afrique de l'ouest dont la superficie équivaut environ à la moitié de celle du Cameroun. Sa population estimée à 12 millions 500 mille habitants est aussi la moitié de celle du pays d'Afrique Centrale. Elle n'a pas de ressources en hydrocarbures mais ses ressources minières et notamment en bauxite la placent dans le trio de tête mondial.

En Afrique francophone, la Guinée est connue comme étant le pays qui répondit non par son leader Sekou Touré au président français Charles de Gaulle lors de sa demande d'association à la France en 1958. Elle accéda ainsi immédiatement à son indépendance et connut des actes de déstabilisation de la part de son ancienne puissance coloniale.

Depuis 2010, l'ancien opposant Alpha Condé, intellectuel panafricaniste ayant été étudiant en économie puis enseignant en France dirige ce pays. En 2020, il modifie la constitution afin de pouvoir présenter sa candidature aux élections présidentielles. Ce projet qui fut contraire aux principes qu'il porta lorsqu'il était opposé aux régimes précédents entraîna de vives réactions négatives de la part des opposants à sa politique.

Alpha Condé a engagé de vastes chantiers sociaux et économiques de modernisation et de développement de son pays avec notamment la construction de barrages et de centrales hydroélectriques pour diminuer le déficit en énergie électrique du pays.


Trois principaux groupes ethniques constituent le paysage culturel de la Guinée: les malinkés, les peuls et les soussous. Alpha Condé est issu de l'ethnie forestière Malinké, ainsi que Mamady Doumbouya, le commandant de l'unité des Forces Spéciales de ce pays. La capitale Conakry est construite dans la région côtière Soussou. Le principal opposant à Alpha Condé s'appelle Cellou Dalein Diallo, c'est un guinéen Peul. C'est un pays dont 60% de la population a moins de 25 ans. 8% de la population a plus de 54 ans. L'espérance de vie y est autour de 62 ans.


Sans être dans le secret des dieux, ni dans le salon des faiseurs de roi, le but de cet article est de comprendre comment le dimanche 5 septembre 2021, 500 jeunes guinéens de l'élite des forces de défense de ce pays ayant à leur tête un ancien légionnaire français âgé de 41 ans ont réussi à s'emparer du sommet de cet Etat démocratique africain.

L'armée guinéenne a un effectif de 45 000 hommes répartis dans l'ensemble du territoire. Elle comprend une armée de terre qui compte la quasi-totalité des effectifs. Une armée de l'air qui a un millier d'hommes et une marine d'environ 500 hommes de la mer.

L'armée de terre a un équipement comportant des fusils, des mitrailleuses, des armes lourdes de types mortiers et canons, des véhicules de transport de troupe, des véhicules blindés et quelques chars. L'armée de l'air a de vieux avions de Combat russes cinquantenaires de type Mig 21, des avions de transport, des hélicoptères de transport et des hélicoptères de combat russes performants de type MI 24 surnommés "chars volants", grâce à leur blindage et leur grande puissance de feu. Quant à la marine, ses équipements les plus significatifs sont des patrouilleurs côtiers.


Comme dans la totalité des pays d’Afrique francophone, il y a des forces de gendarmerie en Guinée, ainsi que des forces de police, un service secret de sécurité intérieur et un service de renseignement extérieur. D’un point de vue sécuritaire, la Guinée est un pays qui fonctionne avec ses moyens qui sont ceux d’un pays africain qui bâtit tant bien que mal un Etat capable de protéger son territoire contre les menaces liées au banditisme, aux trafics, au terrorisme et aux influences néfastes de toutes natures ; qu’elles soient intérieures et extérieures.


La Légion Etrangère est un corps d’Elite de l’armée française qui recrute des hommes de toutes nationalités âgés entre 17 et 39 ans. La seule condition posée aux postulants est d’avoir une Carte d’identité ou un passeport en cours de validité au moment du recrutement. Des vérifications du casier judiciaire des candidats sont effectuées pour exclure les criminels de sang, les trafiquants de drogue et les criminels sexuels. Puis un processus de sélection des candidats sur la base de leurs aptitudes physiques et mentales est effectué, avant leur intégration militaire pour un contrat de 5 ans renouvelable. Les légionnaires suivent une formation rude et participent régulièrement aux missions de guerre de la France partout où la république tricolore juge nécessaire de les envoyer.


Mamady Doumbouya est un guinéen de l’ethnie Malinké. Il intègre la Légion Etrangère en France en 2004. Il est alors âgé de 24 ans. Il sera soldat de cette troupe d’élite française au sein du 2e REI, le Régiment Etranger d’Infanterie pendant la durée d’un contrat, c’est-à-dire 5 ans et en sortira avec le grade de Caporal-Chef. Dans l’armée de terre, un Caporal-chef est un militaire du rang. C’est le grade le plus élevé dans la hiérarchie des militaires du rang. Le Caporal-chef est directement en dessous du Sergent qui est le premier grade chez les sous-officiers subalternes.


En 2012, âgé de 32 ans, Mamady Doumbouya est introduit aux autorités guinéennes par le Général de Gendarmerie Aboubakar Sidiki Camara. Le Général Camara est à l’époque le Directeur de Cabinet du Ministre de la défense de Guinée. Cette cooptation lui permet de rencontre l’ambassadeur de Guinée à Paris Amara Camara à qui il fait part de sa volonté de travailler pour son pays.  Grâce à ses états de service à la Légion Etrangère en France et à la recommandation du Général Camara, Mamady Doumbouya devient instructeur dans le Bataillon Autonome de la Sécurité Présidentielle ; l’Unité d’Elite en charge de la protection du Chef de l’Etat guinéen Alpha Condé.


Alpha Condé est un guinéen né le même jour que Mamady Doumbouya, mais 42 ans plus tôt, c’est-à-dire en 1938. Ils sont tous les deux du même signe astrologique, le poisson et ils sont tous deux originaires de la région de Kankan en Haute-Guinée, à l’Est du célèbre et beau massif montagneux du Fouta-Djalon, surnommé le château d’eau de l’Afrique de l’Ouest, car de nombreux cours d’eau y trouvent leur source, tels que le fleuve Sénégal et le fleuve Gambie. Alpha Condé va à l’école primaire et au collège en Guinée. Il obtient son Brevet d’Etudes Primaires et Elémentaires (BEPC), puis il est envoyé en France en 1953, à l’âge de 15 ans. Il est confié au Maire Pierre Mendès France et obtient son baccalauréat à Paris. Il est diplômé en sociologie et docteur en Droit Public de l’Université de Paris 1 Panthéon-Sorbonne. Il sera également enseignant en Droit et Sciences économiques dans cette université.


Pendant ses études supérieures en France, il milite dans le mouvement panafricaniste FEANF (Fédération des Etudiants d’Afrique Noire en France). En 1970, âgé de 32 ans, il est condamné à mort par Sekou Touré à cause de ses opinions politiques. Alpha Condé rentre en Guinée à 52 ans en 1990 à la faveur de l’ouverture démocratique du pays sous la Présidence du Général Lansana Conté. Il est candidat de l’opposition aux élections présidentielles de 1993 et est battu par le Général Lansana Conté, mais conteste la validité des résultats. 5 ans plus tard en 1998, il est encore Candidat de l’élection Présidentielle, mais il est arrêté et emprisonné. Il obtient une grâce présidentielle après plus de deux ans d’emprisonnement. Lansana Conté est président en Guinée jusqu’à sa mort en 2008. De 2008 à 2010, une période de forte instabilité politique s’installe en Guinée avec notamment l’épisode de la prise du pouvoir par le fantasque Capitaine Moussa Dadis Camara. Alpha Condé est élu président de la République le 21 Décembre 2010 à Conakry. Il est âgé de 72 ans.


En 2015, Alpha Condé est réélu président de la République pour un second et dernier mandat tel que prévu par la constitution guinéenne. Ce mandat s’achève en 2020. Au cours de 10 ans d’exercice de pouvoir démocratique, il est mis au crédit de ce Chef de l’Etat les réalisations structurelles suivantes : L’accroissement de l’énergie électrique disponible pour les entreprises et les ménages de 183 mégawatts à 1400 mégawatts, grâce notamment à la construction de barrages hydroélectriques ; de mini-barrages et de centrales de production d’électricité. La réorganisation du secteur minier et l’attribution de contrats négociés à des entreprises chinoises et russes suscitant la création de milliers d’emplois pour les jeunes. La création de structures sociales en vue de lutter contre la pauvreté. La négociation de prêts avec la Chine pour le financement de projets économiques et sociaux. Malgré ces efforts sur les plans économiques et sociaux, il est reproché à ce progressiste le développement de l’ethnocentrisme néfaste à la construction d’une Nation plus forte.


En 2020, Alpha Condé propose une modification de la constitution afin de briguer un troisième mandat. Ce projet suscite un tollé national et sur le plan international. Le président argue alors qu’il a besoin de plus de temps pour accomplir son œuvre de développement de son pays. Malgré les contestations, la constitution guinéenne est modifiée et le 18 Août 2020, il est réélu dès le premier tour de l’élection présidentielle obtenant un score de 59,5% des voix contre 33,5% pour son principal opposant Cellou Dalein Diallo. Son nouveau mandat est prévu pour une durée de 6 ans.


Pendant qu’il est instructeur dans la Garde Présidentielle de 2012 à 2017, Mamady Doumbouya est envoyé en stage au Sénégal en 2013, puis au Gabon en 2014. En 2017, âgé de 37 ans et étant instructeur dans la Garde Présidentielle de Guinée, Mamady Doumbouya est envoyé à l’Ecole de Guerre de Paris où il suit des cours accélérés dans cette école supérieure de formation à la stratégie militaire de haut niveau. La Caporal-Chef de la Légion Etrangère en France est déjà alors devenu commandant dans l’armée guinéenne et nommé à la tête du Groupement des Forces Spéciales en 2018. Il a 38 ans. Un an plus tard, en 2019, il est promu Lieutenant-Colonel.


Le dimanche 05 septembre 2021, au petit matin, les 500 soldats d’élite des Forces Spéciales de Guinée prennent position dans les lieux stratégiques qu’ils ont préalablement identifiés dans la ville de Conakry. Ils ont déjà quitté leur base de Kaleya à Forécariah située à 85 kilomètres environ du Palais présidentiel guinéen. La colonne d’assaut est constituée de pickup 4x4 équipés de mitrailleuses lourdes, de camions de transports de troupes dans lesquels les soldats d’élites sont installés, prêts au combat. Ils ont également pris leur matériel constitué d’armes d’assauts, de lances roquettes et de mortiers. Dans ce convoi, un blindé leur sert d’armes d’appui pour défoncer les éventuelles places fortes au Canon mobile.


Face à eux, il y a le Bataillon Autonome de la Sécurité Présidentielle (BASP) dont le camp de base appelé Camp Makambo contient l’essentiel des soldats, tandis que la garde se trouve dans la presqu’ile de Kaloum où est bâti le Palais Présidentiel de Sékhoutouréya. Une partie de l’Unité d’assaut des Forces Spéciales se poste autour du Camp de Makambo afin d’empêcher la sortie des renforts qui pourraient aller prêter main forte aux gardes qui sont en poste au Palais Présidentiel. C’est l’Unité Spéciale des Forces Spéciales qui va directement à l’assaut du Palais. Les trois check-points avant les murs du palais ne font pas le poids devant les armes et surtout les soldats hyper entraînés et ultra spécialisés des forces spéciales. Rapidement, après des échanges de tirs nourris laissant sur le carreau une vingtaine de gardes de la présidence et deux soldats des forces spéciales, le président est arrêté et exhibé dans les réseaux sociaux du monde entier. Doumbouya qui fut instructeur dans la Garde Présidentielle pendant 5 ans connaît évidemment le Palais ainsi que certains des Hommes qui en tiennent les points clés. 


Ce dimanche matin, 05 septembre 2021, l’action des Forces Spéciales de Guinée a été fulgurante, synchronisée, préparée et très précise. Les 45 mille forces armées de Terre, de la Marine et de l’air de la Guinée n’y ont vu que du feu et n’ont entendu que les coups de feu lorsque le soldats d’élites étaient déjà à quelques mètres du Chef de l’Etat. Un véritable Blitzkrieg, la guerre éclair chez les stratèges militaires. Malgré les signaux des services secrets guinéens, malgré les soupçons de prises d’initiatives préoccupantes de la part du charismatique commandant des Forces Spéciales, le Président a conservé sa confiance dans l’unité d’élite qu’il a voulue, qu’il a constituée et qu’il a confiée à son fils de confiance Mamady Doumbouya. La centaine de soldats envoyés en formation quelques mois plus tôt auprès des amis turcs n’auront pas le temps de terminer leurs exercices de perfectionnement pour mieux protéger un Palais Présidentiel que les experts en sécurité militaire trouvaient très médiocrement protégé.


Mamady Doumbouya est un soldat du terrain qui a bénéficié d’une formation de très haut niveau dans la Légion française pendant 5 ans. Il maîtrise l’art du combat : il connaît les armes et il a été à l’épreuve du feu dans la guerre lors des expéditions de la Légion française en Afghanistan et d’autres théâtres d’opération de très haute intensité de combat. Il connaît la psychologie de son patron le Chef de l’Etat Alpha Condé qui lui fait entièrement confiance, car il est un Produit de la diaspora et un Homme issu de la région de Kankan comme lui. En 2017, alors qu’il est instructeur dans la Garde Présidentielle, Doumbouya déclara lors d’un colloque: « Dans mon pays, le président élu démocratiquement agit selon ses intérêts, et doit obligatoirement avoir l’armée à ses côtés pour assurer la stabilité du gouvernement. Il choisira donc son état-major parmi ses proches dont il est certain qu’ils ne le trahiront pas. Et pour ce faire, il ne peut calquer le modèle européen, inapplicable chez nous ».


Mamady Doumbouya connaît les réalités opérationnelles de l’armée guinéenne, il en affiche parfois un profond dédain, lui le légionnaire qui a été au combat pour la France, a été formé dans une unité d’élite de ce pays et a ensuite bénéficié du support très haut placé de la Guinée pour se perfectionner chez les Etats partenaires de la Guinée et dans le creuset de la connaissance stratégique de l’art du combat à l’Ecole de Guerre en France. Il a minutieusement préparé son attaque, il a collecté toutes les informations avec ses soutiens ; agenda du président, temps de réaction des autres unités du pays, lourdeurs de la chaîne de commandement…Il a informé ses hommes des Forces Spéciales qui méritaient d’être dans la confidence en avance et les autres, soldats d’élite ont obéi en militaire au discours de leur leader charismatique. Lui et son état-major ont planifié l’opération, ils ont établi la synchronisation de leurs actions, puis le jour choisi, ils ont lancé l’opération. L’objectif le plus efficient était la capture de la pièce maîtresse, puis de communiquer sur ce fait d’armes rapidement en utilisant la vitesse de l’Internet. Le Blitzkrieg s’est terminé en un échec et mat total.


Un Homme seul et une troupe fût-elle d’élite ne prend pas le pouvoir par sa seule volonté dans un pays certes confronté à de nombreux problèmes, mais un pays qui fonctionne et qui n’est pas en proie à un chaos quotidien. Il y a eu des soutiens nombreux à l’intérieur et à l’extérieur de la Guinée. Mamady Doumbouya a été homme de rang pendant 5 ans de 2004 à 2009 en France. Il devint l’Homme de confiance du Chef de l’Etat de 2012 à 2017, au service de sa garde, puis Patron de l’unité la plus puissante et la mieux équipée du pays à partir de 2018. Ce type de parcours exceptionnel donne un carnet de relations sûres et de supports dans les pays où on est formé. Si en plus on a l’entière confiance du Chef suprême des armées, on fait ce qu’on veut quand on le juge opportun. Mamady Doumbouya a été le porte-drapeau du putsch parce qu’il était certain que le Coup réussirait. Bien évidemment, en homme de terrain, il savait qu’il y aurait des victimes. Mais il s’est dit qu’on ne fait pas d’omelette sans casser les œufs. Et pour paraphraser une expression qu’il a utilisée une fois le pays tombé : quand on connaît bien les forces et les faiblesses de la Guinée, on n’a pas besoin de la violer, on peut la flatter sans trop la contraindre et lui faire l’amour.


La question qui se pose est la suivante : Ce violent schisme guinéen permettra-t-il d’améliorer la situation économique misérable de la majorité de la population et de résoudre les difficultés endémiques de ce pays d’Afrique de l’Ouest? On peut en douter fortement, car Alpha Condé a certes été un leader qui a trahi ses propres engagements en modifiant la constitution pour prolonger son mandat ; Alpha Condé est certes accusé et responsable du développement de l’ethnocentrisme en Guinée, mais Alpha Condé est aussi un Leader auquel on ne connaît pas de pillage des ressources de son pays. C’est un homme intelligent, patient, cohérent et consistant qui consacra plus d’un siècle de sa vie à lutter en état de faiblesse contre les systèmes dictatoriaux de son pays, au prix de sa vie. Quel que fût le patriotisme du Caporal-Chef de la Légion en France devenu Lieutenant-Colonel en Guinée, quel que soit son engagement sincère à travailler pour son pays, un putsch est un arrêt brutal du développement d’un pays. Un militaire d’élite remplit son devoir en soldat d’élite. Le devoir des Forces Spéciales n’est pas de prendre le pouvoir. Non ! Un soldat veille sur les autres, mais ne vient pas au-devant de la scène; au pouvoir, même s’il en a la volonté, la compétence, la puissance et le pouvoir. Il faut savoir choisir ses métiers.


Pour emprunter une fois encore à la métaphore pas comique, mais ridicule des putschistes du Fouta-Djalon, le pouvoir politique au service d’une Nation est une femme séduisante quand on la convoite et qu’on l’observe sans devoir répondre à toutes ses exigences quotidiennes. Quand on commence à lui faire l’amour, on se rend compte qu’elle est complexe, instable, exigeante, et qu’elle est très convoitée de toutes parts par d’autres Etats aux intérêts divergents, on constate qu’il faut la protéger des brigands dont les armes ne sont pas des canons, ni des mitrailleuses, mais des plans astucieux, des pièges pernicieux qu’on ne rencontre pas sur le champ de bataille. Il y a la convoitise des alliés, celles des subalternes qui se voient chefs à la place du chef ; il y a les ennemis de toutes sortes qui dupent les amis, les amènent à retourner leurs vestes plusieurs fois. On en perd rapidement le sommeil pour sombrer dans la folie des grandeurs.


Serge Mbarga Owona

Mathématicien, poète, écrivain.

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