dimanche 29 mai 2022

20 MAI 2022: Le défilé du cinquantenaire de la fête nationale du Cameroun.

Le vendredi 20 mai de l’an de grâce 2022, j’ai assisté au défilé de la fête nationale du Cameroun sur le Boulevard du 20 Mai. L’Afrique en Miniature comme nous surnommons notre pays, célébrait les noces d’or de l’Etat Unitaire. La réunification du Cameroun issu des tutelles anglaises et françaises s’est en effet déroulée le 20 Mai 1972. Les autorités politiques du pays d’Afrique Centrale avaient décidé de réunir ce que la domination étrangère avait divisé plusieurs années auparavant. Deux ans durant, le défilé ne se déroula pas à cause de la pandémie du Covid-19 qui frappa le Cameroun comme l’ensemble des pays de la terre. Le 20 Mai 2022, la plus grande célébration de la Nation camerounaise faisait son retour sur la place des fêtes nationales, le Boulevard du 20 mai à Yaoundé.


Le jeudi, veille de la fête nationale, je pris un car de transport à Douala et dans l’autoradio, le chauffeur mit le poste national dans lequel une musique variée était diffusée, ainsi que des informations en rapport avec le grand événement du lendemain. Les journalistes firent un rappel historique sur l’origine de la fête de l’Unité Nationale et ils parlèrent aussi des grandes manifestations populaires qui rythmaient la préparation de ce grand jour. L’exposition du matériel et des savoir-faire des forces de défense et de sécurité, la retraite au flambeau, un rassemblement nocturne populaire, au cours duquel la jeunesse et ses encadrants défilent dans les rues de Yaoundé la capitale, en direction du rond-point de la Poste Centrale. Toutes et tous porte des flambeaux symbolisant notre ardente Unité Nationale.

Vendredi matin à Yaoundé était le jour de la grande parade sur le boulevard du 20 Mai. Très tôt, il fallait être prêt pour arriver sur le lieu de la cérémonie, passer les contrôles de sécurité, puis s’installer à la tribune en attendant l’arrivée des différents corps de l’Etat, ainsi que les invités de marque, membres du corps diplomatique. Bien que j’eus un laisser-passer permettant de garer la voiture dans un parking sur les lieux de la cérémonie, je pris un taxi qui me déposa sur la Route Nationale N°1, à quelques centaines de mètres du tout nouveau Monument Patriotique. Je marchai alors, le pas serein, l’esprit égayé dans un grand boubou couleur ivoire vers la place du défilé.

Dès que les contrôles de sécurité furent passés, je m’installai en tribune, avec une vue parfaite sur le boulevard des cérémonies officielles. Sur chaque chaise, les organisateurs avaient installé des magazines divers, montrant les réalisations du gouvernement de la Nation. De grands projets qui font la fierté de notre pays en construction accélérée : infrastructures routières, barrages hydroélectriques, complexes sportifs, hôpitaux régionaux de référence, Universités nouvelles, port en eaux profonde. Je lus les différents magazines, pendant que les soldats d’honneurs achevaient leur mise en place.

Puis commencèrent à arriver les hautes personnalités de la république sur la place des fêtes. Ministres et directeurs Généraux, ambassadeurs, Etat-major des armées et officiers supérieurs invités, Procureur Général, Président du Conseil Constitutionnel et son bureau, Président du Conseil Economique et Social, Premier Ministre Chef du Gouvernement, Président de l’assemblée Nationale, Président du Sénat Etc. Peu avant l’arrivée du Chef de l’Etat, la première Dame fit son entrée sur les lieux de la cérémonie, rayonnante comme toujours. Son cortège fut accompagné par un hélicoptère des Forces de Défense vrombissant de puissance au-dessus de la place des fêtes.

Ce fut d’abord sur les grands écrans de télé que l’arrivée du sage leader de la Nation fut annoncée. Le Chef de l’Etat que certains surnomment Le Sphinx, Nnom Gui, Popol, l’Homme Lion était en chemin pour donner le top départ des cérémonies marquant les noces d’or de l’Etat Unitaire. Quand les premières images du cortège apparurent, mon voisin de tribune me chuchota « Le pouvoir suprême est donné par la volonté divine ».
Nous parlâmes de l’importance du sens élevé de la mesure du Leader suprême dans la conduite des affaires d’un pays complexe comme le Cameroun, notre beau pays. Il ne faut pas être clivant, il ne faut pas être impatient, il ne faut pas être intolérant, il faut être au-dessus de la mêlée, savoir écouter toutes les sensibilités nationales et avoir la plus haute idée patriotique de la défense des intérêts du Cameroun. Le cortège du Président fut imminent, escorté par une multitude de motos de sa garde d’honneur. Puis, ce fut d’abord l’hélicoptère des Force de Défense survolant la place des fêtes qui nous indiqua qu’il serait bientôt là. A quelques centaines de mètres de la place des fêtes, une escorte de chevaux blancs et bruns entoura sa voiture. Les cérémonies officielles étaient sur le point de démarrer.




Dès que le Chef de l’Etat fut sur la place du défilé, l’orchestre de la Garde Présidentielle chanta l’hymne national, puis il effectua la revue des troupes à bord de sa limousine de marque Range Rover noir, d’un mat brillant. Pendant la revue des troupes, la voiture de commandement du Général Agha Robinson en charge de la conduite du défilé militaire suivait celle du Chef de l’Etat, ainsi que sa garde rapprochée, attentive et élégante dans ses costumes noirs, taillés sur mesure. Les invités présents dans les tribunes, ainsi que la foule de citoyens heureux en ce jour de fête nationale acclamèrent l’Homme qui incarne la stabilité granitique et la marche souveraine du Cameroun vers son destin de pays Leader en Afrique. Le Cameroun est respecté pour sa stabilité, sa résilience face aux turbulences qui affectent certains pays d’Afrique. C’est un combat de tous les instants que mène notre pays, poumon économique d’Afrique Centrale affrontant les appétits voraces de ceux qui ont intérêt à le détruire pour se gaver du sang des souffrances populaires.

Les Forces de Défense et de Sécurité ; l’institution de ceux et celles qui combattent tous les jours contre les agresseurs armés ouvrirent le bal des festivités. Le Cameroun mit l’armée sœur du Congo aux avant-postes pour le cinquantenaire de son Etat Unitaire. Les paras brazzavillois firent l’honneur de leur marche commando à Yaoundé dans leurs treillis camouflés, leurs bottes noires scintillantes et leur besace de commando carrée, portée rigidement sur le dos avec grande élégance guerrière. Les bérets rouges bien ajustés sur leurs têtes, ils ouvrirent le défilé sous les applaudissements du public. A la suite des commandos de Brazzaville, toutes les autres unités de vaillants soldats en charge de la protection du pays et de ses citoyens nous firent grand plaisir en défilant le front haut, le torse bombé, frappant les pieds au sol dans un bruit qui mit les tressaillements de joie sur les visages, au boulevard des fêtes.

Les aéronefs à voilure fixe ; avions de transport de troupes, avions de reconnaissance, et les aéronefs à voilure tournante, hélicoptères d’attaque, hélicoptère de transport constituèrent le défilé aérien. Les véhicules blindés de transport des soldats, ceux équipés de canons, les automitrailleuses défilèrent devant le public admiratif de ce matériel roulant indispensable pour remporter des victoires sur les différents fronts guerriers imposés au Cameroun par les ennemis internes et externes. Les soldats de la Force Multinationale mixte qui combattent le terrorisme de Boko Haram dans leurs pick-up 4x4 munis de mitrailleuses lourdes furent beaucoup applaudis, ainsi que les Forces Spéciales dans leurs véhicules dépouillés de tout artifice pour leur conserver une efficacité rustique au combat ; le Bataillon d’Intervention Rapide et ses véhicules blindés anti-mines fut impressionnant et adulé comme d’habitude ; la marine nationale présenta un échantillon de ses patrouilleurs de combat ayant à leur bord des commandos de marine simulant des gestes de nage accrochés à ces vedettes rapides.

Après les militaires, ce fut le tour des civils de défiler sur le boulevard du 20 Mai. L’ouverture fut faite par des jeunes habillés de tenues traditionnelles issues des quatre aires culturelles du Cameroun : les cultures de la forêt, celles des hautes montagnes, celles de la plaine côtière et celles de la zone sahélienne. Ces défilants exécutèrent des tours d’acrobaties et des pas de danse traditionnels qui mirent un éclat festif encore plus éclatant au défilé de la 50eme fête de l’Unité du Cameroun. Ce furent ensuite les enfants des écoles primaires qui arrivèrent, le pas alerte dans leurs tenues d’écoliers, tenant en main et soulevant des bouquets de fleurs, des pancartes et des éventails aux couleurs du drapeau national. Les enfants du primaire chantèrent l’amour de leur Patrie le Cameroun et celui de l’Unité Nationale avec leurs voix aigues, suscitant des applaudissements nourris du public sur le boulevard du 20 mai et dans les rues proches où un public conséquent s’était rassemblé.

Le défilé des enfants des écoles primaires fut suivi par celui des collégiens, des lycéens et des étudiants de l’enseignement supérieur. Ces derniers, furent très originaux en défilant au rythme de leur propre fanfare et en présentant des ballets de danse très appréciés par le public qui accompagna les différents passages d’applaudissements enthousiastes.

Le vivre ensemble, l’harmonie, la paix, la cohésion nationale, le refus de la haine furent des engagements importants, inscrits sur les différentes banderoles portées par la jeunesse du Cameroun. Le drapeau tricolore étoilé était bien évidemment en bonne place, sur les mains fermes le portant vers l’avant avec honneur et fierté. Les défilants gardèrent le rythme et l’enthousiasme de la fête du cinquantenaire de l’Unité Nationale, même lorsqu’il se mit à pleuvoir sur la capitale du Cameroun.

Le défilé civil fut clôturé par les partis politiques représentés à l’assemblée nationale. Les nombreux militants participèrent aux noces d’or de l’Unité Nationale en portant des tenues aux couleurs de leurs organisations. Toutes ces associations politiques porteuses de projets divers mirent en avant leurs idéologies et slogans sur des pancartes, exprimant ainsi la multiplicité des opinions politiques et leur libre expression au Cameroun, l’Afrique en Miniature.
Certains militants et militantes de partis firent des mouvements dansants dans un ballet préparé minutieusement lors des répétitions. Le drapeau était en bonne place dans les carrés des défilants, ainsi que l’effigie du Chef de l’Etat Paul Biya pour les partis alliés au leader national et président du parti majoritaire, le Rassemblement Démocratique du Peuple Camerounais. Le défilé des partis fut clôturé par le premier parti en termes d’élus à l’Assemblée Nationale, le RDPC. Il défila en masse avec de nombreux carrés de militantes, de militants et de jeunes. Il est à noter que ce parti construisit un char pour son défilé. Sur ce char, une grande effigie de son président national, ainsi qu’une impressionnante flamme symbolisant son dynamisme politique furent fixés. Une fanfare spéciale jouée par les militants de ce parti rythmait leur pas alerte et déterminé pendant leur passage sous les ovations du public.

Le défilé de célébration du cinquantenaire de la fête nationale du Cameroun s’acheva avec le départ du Chef de l’Etat sous le chant vibrant du Grand Alléluia de Haendel, joué par la fanfare de la Garde Présidentielle. Les autres invités à cette fête grandiose quittèrent le Boulevard du 20 mai après le Président de la République.
Les noces d’or de la fête nationale du Cameroun resteront un moment inoubliable, extraordinaire de célébration de l’Afrique en Miniature. Le défilé de célébration mit l’armée, la jeunesse camerounaise, du primaire au supérieur, ainsi que les partis politiques à l’honneur sur le boulevard du 20 Mai. 

Vive le Cameroun Un et Indivisible.


Serge Mbarga Owona
Mathématicien, écrivain, poète.

lundi 23 mai 2022

Connais-tu mon beau village?

Au Cameroun, dans la région du Sud, il y a un village qui s’appelle Akom Bikoé; il s'agit de mon village. J’y suis allé depuis que j’ai cinq ans et à l’époque, j’y étais accueilli par ma grand-mère paternelle qui arrivait dans la cour en courant, s’écriant « Mon Mari est arrivé, mon mari même est arrivé »; puis elle me serrait dans ses bras affectueux. Je suis en effet l'homonyme de mon grand-père paternel. Ce moment est resté le plus vieux souvenir de mon village gravé dans ma mémoire.

 

Akom Bikoé est un village qui s’étire sur une longueur de cinq kilomètres dans la forêt dense tropicale au Sud géographique du Cameroun, et dans la région administrative qui s’appelle « Région du Sud ». Ce village est situé dans le département qui porte le beau nom « Océan » et fait partie de l’arrondissement appelé Mvenguë. Il y a deux autorités administratives dans mon village; une qui s’appelle le chef de groupement, et l’autre, le chef du village. Dans ce village qui se développe en forêt tropicale dense, les femmes et les hommes sont reconnus par leurs liens familiaux. L’union des familles constitue des clans et à l’échelle au dessus des clans, il y a la grande organisation sociétale traditionnelle en lignages.

 

Mon village est situé au sud de la Capitale Yaoundé, à une distance de 130 kilomètres sur une route bitumée sur une longueur de 117 kilomètres. La précision sur la longueur du bitume est importante, car j’ai connu une époque où cette route était dans un état désastreux et poussiéreuse ou boueuse en fonction des saisons. Il fallait posséder une puissante voiture de type 4x4, beaucoup de courage, de la volonté et surtout de la patience pour se rendre dans mon village, en effectuant un trajet minimum de 6 heures de temps. La route est désormais en excellent état et les 13 kilomètres non encore bitumés sont en cours de travaux. Nul doute que dans 3 mois, il y aura du bitume serpentant toute la forêt belle et profonde, dans les collines et les vallées nombreuses de ce village magnifique.

 

Pour se rendre à Akom Bikoé, il faut préparer ses yeux et tous ses autres sens à la découverte de l’extraordinaire. Au départ de Yaoundé, on prend la direction du sud sur la Route Nationale 3. Il y a sur le chemin 4 villes et un village d’étape: Ngoumou, Akono, Olama, Ngomedzap et le village Ebouam. Pour arriver dans la ville de Ngoumou, on roule sur la Route Nationale 3 entre Yaoundé et Douala pendant quelques kilomètres, puis dans la localité appelée Nnom ayos, on suit les panneaux indiquant Ngoumou. Entre la ville de Ngoumou et la ville suivante appelée Akono, il y a une distance de 11 kilomètres, puis entre Akono et Olama, on parcourt 10 kilomètres. Depuis Olama, pour atteindre la ville de Ngomedzap, il y a 24 kilomètres à parcourir. Il y a ensuite 19 kilomètres entre la ville de Ngomedzap et le village d’Ebouam. Une fois qu’on atteint le village Ebouam, il y a un embranchement routier en travaux qui monte et descend dans l’escarcelle des collines dites d’Ebouam. C’est sur ces nombreuses collines que sera posée la dernière portion de route bitumée en travaux jusqu’à mon village akom Bikoé. Il y a 13 kilomètres de route entre Ebouam et mon village.

 

Akom Bikoé est un beau village qui plonge le corps et l’esprit dans la nature en pleine forêt tropicale. Pourquoi je le trouve si particulier et tellement beau, ce village? Les raisons sont nombreuses: le climat y est modérément chaud, sans l’humidité des zones côtières qui semble propager la moiteur sur les sols et les maisons. Il pleut en saison pluvieuse globalement entre les mois d’avril et octobre, puis il y a un soleil toujours apaisé par le grand ombrage de la forêt de novembre à mars.

Le paysage est constitué par une impressionnante forêt qui occupe les vallées et les collines et dans laquelle on entend le grondement des rivières dévalant les pentes luxuriantes ou coulant doucement entre les racines profondes des nombreuses essences d’arbres centenaires qui grandissent en forêt. Il y a beaucoup de grands arbres dans ce paysage magnifique, mais aussi une quantité époustouflante d’arbustes et d’arbres fruitiers dont les parfums contribuent à maintenir l’odorat dans l'exaltation des nouvelles senteurs rares offertes à la découverte.

Dans cette vaste forêt, il n’y a pas que les rivières qui emplissent la nature de leurs grondements et bruits moins audibles au lointain. Il y a également les nombreux chants d'oiseaux et les sons surprenants de tous les animaux qui vivent sous l’ombrage des grands arbres, en se nourrissant des graines et des fruits qui mûrissent en temps choisis par la nature généreuse ici. Bien évidemment, le vent est agréable dans ce milieu préservé des pollutions de tous types engendrées par l’action agressive de la civilisation urbaine.  Le vent est agréable et surtout, l’air est pur à Akom Bikoé.

 

Les mots sont vains, quand les images peuvent permettre d’apprécier la beauté exquise de mon village paradisiaque. 

 Route entre les villes de Ngoumou et Akono




Ciel bleu et verdure à perte de vue




La belle cathédrale d'Akono




La route bitumée serpente dans la forêt



Akom Bikoé: travaux avant bitumage en cours 


Akom Bikoé. quartier Nkouar Mbama

Akom Bikoé: la pierre (Akom) symbole du village

Akom Bikoé: paysage fleuri à profusion

Akom Bikoé: le centre de santé

Akom Bikoé: l'école primaire

Akom Bikoé: le hangar du marché périodique

Akom Bikoé: vieux système de séchage du cacao

Akom Bikoé: Récolte du vin de palme

Akom Bikoé: paysage fleuri

Akom Bikoé: brume matinale sur le Mont Messol

Akom Bikoé: les arbres de la forêt

Akom Bikoé: brume matinale sur les collines

Akom Bikoé: antenne de téléphoie mobile

Akom Bikoé: récolte de vin de palme

Akom Bikoé: l'école publique

Akom Bikoé: l'école publique

Akom Bikoé: drapeau dans la cour du chef

Akom Bikoé: L'énergie est solaire dans le village

Akom BIkoé: derniers tronçons de bitume en cours

Akom Bikoé: travaux routiers

Akom Bikoé: Fleuve Bikoé

Akom Bikoué: fleuve Bikoué

Akom Bikoué: fleuve Bikoué

Akom Bikoué: prunier

Akom Bikoué: dernières semaines de route en terre

Akom Bikoué: travaux routiers en cours

Akom Bikoué: pierres de construction de caniveaux













Akom Bikoué: village tranquille en forêt
















Serge Mbarga Owona

vendredi 20 mai 2022

Lettre d'amour au Cameroun

Très cher Cameroun,

Je t'écris aujourd'hui, car je pense à toi comme je le fais tous les jours. Tôt chaque matin, le parfum de ta terre belle et diverse adoucit mon réveil de ses senteurs agréables.

Sais-tu que tu es un paradis de diversité culturelle, sociale, climatique, géographique, humaine, florale? Tu es le  fruit d'une union séculaire entre les peuples de la forêt, ceux de la montagne, de la savane, des eaux douces ou de mer et du désert. Cette union fait de toi un concentré de beautés exquises qui font battre mon cœur chaque fois, en pensant à toi.

Je te surnomme affectueusement Afrique en Miniature comme toutes ces femmes et ces hommes qui t'aiment sincèrement et comptent sur toi pour vivre heureux, épanouis, en paix, en bonne santé et prospères.

Depuis ma naissance, tu as toujours été le pays des grandes pluies qui chantent sur les toits de paille, de tôle ondulée et tous les autres toits qui couvrent les chaumières de ta terre aux multiples couleurs du bord de la mer, de la savane, en pleine forêt et sur les montagnes. Tu es le pays du soleil qui sourit et brille sur l'étoile de ton drapeau tricolore aux couleurs des feuilles vertes, de la chaleur africaine jaune et du sang rouge de tes filles et fils travaillant pour que tu sois toujours plus beau, plus grand, plus accueillant et paisible.

Très cher Cameroun, de plus en plus, nous allons te dire "j'aime mon pays le Cameroun", car nous avons remarqué que l'amour est meilleur quand on le dit et quand on le vit tous les jours. Nous allons prêter plus d'attention à toi, car l'amour peut grandir tous les jours sans aucun problème; l'abondance d'amour ne nuit pas. Tu es le centre d'attention de toutes celles et tous ceux qui t'aiment, car tu irrigues le sang de leurs cœurs vers leurs esprits féconds, emplis de passion.

Afrique en Miniature, Nation aux grands défis présents et au magnifique futur; aujourd'hui est ton jour, le 20 Mai, le jour de notre fête nationale. Voici 50 ans que tu as choisi l'anneau de l'Unité dans la diversité. Alors cher beau pays qu'on aime, chère patrie, terre chérie, tu seras toujours debout, car toutes tes filles et fils du Nord au Sud, de l'Est à l'Ouest sont jaloux de ta liberté. Berceau de nos ancêtres, tu auras toujours notre amour, car tu fais notre bonheur. Sois élevé très haut  dans l'honneur pour les siècles des siècles.


Serge Mbarga Owona

Mathématicien, écrivain, poète.

dimanche 8 mai 2022

Retour au pays natal.

Le 08 Mai 2008, un avion de la compagnie aérienne Air France a atterri à l’aéroport de Yaoundé Nsimalen. C’était il y a 14 ans et j’étais dans cet avion. Peu de personnes étaient au courant du périple que j’avais entrepris de façon décisive quelques mois plus tôt pour rentrer au Cameroun. Il faut dire que plusieurs années auparavant, fraichement muni d’un Diplôme d’Etudes Approfondies en physique mathématique de l’Université des Sciences et technologies de Lille en France, j’avais décidé de rentrer chez moi. « Tu viendras faire quoi ici ? » ; « il n’y a rien pour toi ici », furent quelques-unes des phrases sentencieuses qui me furent dites, tant en famille, que devant les portes closes que j’essayai d’ouvrir.

Au mois de février 2008 je fus contacté par une entreprise privée camerounaise, une multinationale de télécommunications. Pourquoi fus-je contacté ? Parce que mon CV était dans leur base de données et mon profil les avait intéressés. Pourquoi mon CV était-il dans leur base de données, parce que je l’y avais déposé, à la faveur de mes voyages au Cameroun pour promouvoir mes livres et mener des activités de vulgarisation technologique et culturelle ; notamment mon premier ouvrage paru en 2005 chez l’éditeur l’Harmattan à Paris: « Le jeu de Songo ».

Je fais ce rappel rétrospectif pour montrer qu’un retour au pays natal est un projet qui se bâtit sur la durée avec la volonté inébranlable de rentrer. En Février 2008, j’étais responsable multimédia travaillant à Lille et je reçus le coup de fil d’une dame, une jeune camerounaise qui m’informa que la Direction Marketing de sa multinationale souhaitait s’entretenir avec moi en vue d’un recrutement au Cameroun, dans leur nouvelle unité en charge du développement des produits et Services Internet. Je n’avais pas de problème d’emploi, ni un problème de subsistance quelconque. Je reçus cette information avec calme et enthousiasme. Puis, je n’eus plus de nouvelles pendant quelques semaines. Je me dis alors que quelqu’un d’autre avait peut-être été recruté. Je rappelai le numéro de contact qui m’avait été fourni et un Monsieur m’informa que des troubles sociaux survenus au Cameroun en février 2008 avaient entraîné la suspension des processus de recrutement des collaborateurs.


L’entretien téléphonique eut finalement lieu au mois de Mars 2008. J’avais à l’autre bout du fil trois jeunes camerounais rigoureux qui me parlèrent de leur besoin, de l’intérêt de mon profil pour les nouvelles orientations de l’entreprise liées au développement de l’Internet au Cameroun. Je fus très sérieux, mais détendu pendant cet échange qui dura plus d’une heure.  J’avais un emploi confortable, stable en France, à Lille dans un environnement professionnel épanouissant et respectueux de la diversité ; je maîtrisais les enjeux du développement de l’Internet, car depuis la fin de mon parcours académique, j’avais travaillé à Paris dans des environnements de développement de logiciels informatique et de mise en place de services multimédia en relation avec les nouveaux besoins du réseau Internet.

J’avais déjà publié quelques livres, développé des projets personnels sur des logiciels de jeux divers (Dames, Ludo, Awalé, Songo, Chiffres et lettres…) avec des versions disponibles sur Internet ; je m’occupais d’un site Internet communautaire dans lequel je publiais des articles sur des enjeux d’innovation technologique en Afrique en rapport avec l’identité culturelle, je participais à des séminaires et des projets de vulgarisation scientifique et technologique au Cameroun, j’étais également actifs dans des radios locales à Lille avec des amis issus de pays divers et d’horizons intellectuels variés : juristes, philosophes, journalistes, mathématiciens, chimistes, ingénieurs etc. « Il faut rentrer au Cameroun, nous avons besoin de profils tels que le tien ». Tels furent en substance les mots du Directeur qui menait l’entretien. Je reçus un contrat quelques jours plus tard, je le signai et le renvoyai au Cameroun. Ainsi fut bouclé mon retour.

Je n’avais jamais vu, ni entendu parler des personnes avec lesquelles je scellais ainsi mon retour au pays. En discutant au téléphone, nous avions établi un lien de confiance bâti sur mon parcours, mes réalisations, ma volonté de rentrer, le besoin de l’entreprise, l’expertise des recruteurs dans la connaissance des profils qu’ils recherchaient. Je rencontrai mes trois interviewers une fois arrivé au Cameroun. Ils étaient en tous points conformes à l’impression qu’ils me firent au téléphone, deux hommes et une femme ; des leaders camerounais, africains optimistes convaincus.


Pourquoi va-t-on ailleurs ?

Les raisons du départ sont nombreuses et dépendent des rêves, des moyens, des problèmes, des espoirs, des besoins, des habitudes culturelles et des contraintes de chacun.

Pour certains jeunes ou moins jeunes camerounais, les rêves d’un meilleur accomplissement social ou professionnel ne se trouvent pas au Cameroun, mais ailleurs. Ils s’en vont donc pour réaliser leurs rêves quelle que soit la position sociale, les avantages et facilités dont ils bénéficient au Cameroun. Pour d’autres, le départ est l’opportunité de trouver les moyens d’une meilleure existence. Pour ceux-là, le pays n’offre aucune perspective de bonne existence. Il faut donc absolument partir pour aller tenter sa chance ailleurs. Ce départ est précédé d’une épargne suffisante pour tenir pendant le temps variable du parcours et celui où le risque commencera à devenir payant. Bien évidemment, l’échec est envisagé, mais on le met sur la balance avec un manque de perspectives rassurantes dans son pays de naissance.


Il y a des femmes et des hommes qui partent parce qu’ils ont des problèmes. Des problèmes d’emploi, des problèmes sociaux, politiques, des problèmes de santé. Le Cameroun n’ayant pas su répondre à leurs difficultés, ils regardent ailleurs afin de trouver des solutions plus intéressantes ou moins stressantes pour leurs vies. Ces départs sont contraints. Il est probable qu’une fois les difficultés qui ont conduit au départs résolues, le retour au pays natal est envisagé, puis concrétisé. L’ailleurs est parfois aussi le lieu où le voyageur va nourrir les espoirs d’un avenir meilleur. L’ailleurs devient le lieu d’où l’on reste accroché au chez soi, vivant là-bas, mais l’esprit enchaîné dans un quotidien situé ici, à des milliers de kilomètres. Un quotidien auquel on s’intéresse passionnément, malgré le temps qui indubitablement produit sur soi les effets de l’Homme déphasé ; la perte de contact avec la réalité fluctuante du pays des origines.


On s’en va également parce qu’on a des besoins : besoin de perfectionnement professionnel, de parachèvement d’une formation de haut niveau avec les meilleurs spécialistes mondiaux, besoin de découvrir des horizons académiques inexistants au Cameroun ou de qualité moindre ici ; besoin de refaire sa vie, ou tout simplement besoin de respirer un air différent sous des latitudes nouvelles. Alors, on s’en va afin que l’ailleurs comble ses besoins. Il y a aussi des peuples dont l’émigration est un trait culturel séculaire. Pour eux, partir est une habitude ancestrale. On part en restant attaché au chez-soi comme d’autres l’ont fait avant. Le départ n’est ni un drame, ni un exploit particulier. C’est une aventure quasi initiatique, une expérience qui se transmet depuis de nombreuses générations et qui est amenée à se poursuivre.


En 1993, tout juste bachelier (BAC C) dans le plus grand Lycée public du Cameroun, le Lycée General Leclerc de la capitale Yaoundé, je m’envolai pour Lille en France. Ce voyage avait été préparé à mon insu de longues années avant, par mes parents qui étaient fonctionnaires pour l’un et infirmière dans une société parapublique pour l’autre. Ils avaient donc dû beaucoup épargner, beaucoup se priver et priver la famille de ressources financières stockées dans une longue épargne. L’épargne de mes parents fut conséquente pour payer les frais très importants exigés pour que je puisse effectuer des études sérieuses dans un pays au niveau de vie plusieurs fois plus élevé que celui du Cameroun. Mon départ avait donc été décidé par mon père et ma mère afin selon eux que je puisse bénéficier d’un avenir meilleur. L’émigration ne figurait dans aucun de mes plans d’avenir. J’étais un adolescent épanoui dans la pleine jouissance de ses 18 ans à Yaoundé.


Ayant effectué un parcours scolaire rigoureux et sans aucune fausse note dans des écoles publiques au Cameroun, j’avais été éduqué tant au niveau scolaire que familial dans le culte de l’excellence et la certitude que le Cameroun offrait des opportunités d’éducation sérieuse et d’épanouissement appréciable quand on avait la détermination nécessaire et le talent suffisant.

J’étais certainement trop enthousiaste et embué dans la naïveté juvénile des esprits qui ont été biberonnés dans un socle familial de la classe moyenne, pas riche, mais possédant ce que mon père nomme toujours « le minimum vital ». Un environnement surtout honnête et protecteur. Pendant longtemps, nous avions vécu dans ce qu’on appelle une maison en terre battue recouverte de ciment. Il en était de même pour les maisons de mes copains d’enfance. Nous étions heureux dans nos vies simples, dans notre quartier populaire.

Le cadre familial modeste était un paradis de liberté, d’émulation intellectuelle et d’apprentissage de la vie avec une éthique de l’effort, de la connaissance profonde de sa culture et de l’amour de son pays. Deux ans avant mon départ, mes parents avaient achevé les travaux de leur nouvelle maison. Elle n’était plus en terre battue, c’était une villa bâtie en matériaux définitifs : parpaings de sable et de ciment, béton, tôle ondulée etc.


Mais les parents avaient décidé que je devais partir. Certains que c’était le meilleur choix pour moi, ils avaient préparé mon départ de longue date, malgré la liberté totale dont nous avions toujours bénéficié dans le choix de nos études. Il fallait juste être sérieux à l’école. D’ailleurs, un petit challenge avait été établi par notre mère, entre tous les enfants de la maison ; frères et sœurs, cousins. Il fallait avoir la meilleure note à chaque trimestre, quelle que fût sa classe. Si un petit cousin en CP avait 18 de moyenne et une grande sœur en terminale n’avait que 13, le premier lot revenait au cousin de CP. Chaque enfant voulait être lauréat du challenge. Il y eut ainsi une positive émulation pour les études dans notre maison.

Puisque je devais partir, alors je partis avec la patiente et irrésistible détermination de revenir un jour, car autant à la maison, à l’école ou dans mon quartier, la culture populaire nous avait martelé une propagande patriotique un peu bête, mais terriblement efficace : « vert rouge jaune, c’est la plus belle des couleurs ».


Pourquoi faut-il rentrer ? 

Avec d’autres, nous sommes le fruit d’une éducation populaire camerounaise qui a fait du drapeau national notre premier emblème de fierté. Il y avait le drapeau tricolore étoilé à l’école, de la maternelle au lycée et les enseignants nous parlaient du Cameroun avec enthousiasme et passion. « Vous êtes la fine fleur », nous avait dit un enseignant de première C au Lycée, pour nous exalter à plus d’efforts. Adolescents, nous avions déjà pleinement conscience des œuvres des héros nationaux Martin Paul Samba, Douala Manga Bell, Um Nyobé, Mbappé Leppé, Roland Moumié…Nous étions camerounais et rien d’autre n’existait en dehors de notre pays exceptionnel, le Cameroun dont les exploits intellectuels, culturels et sportifs étaient célébrés chez nous et dans le monde entier. Le premier pays africain quart de finaliste d’une coupe du monde de football ; le pays de Roger Milla et de Manu Dibango. L’Afrique en Miniature.

Cette propagande patriotique avait contribué à construire chez certains comme moi et ceux de ma génération un état d’esprit de champions, sûrs de leur place dans leur pays, marchant tête haute et certains que l’ailleurs n’offrait pas forcément l’idéal de vie.

Je partis donc en Europe contraint et ce déchirement fut ancré en moi de longues années durant. Pourquoi doit-on partir alors qu’on a pratiquement tout pour bâtir le bonheur ici ? A 18 ans, je n’avais pas de réponse à cette question. D’ailleurs personne dans la famille n’aurait écouté ma réponse. Pour certains jeunes bacheliers, partir était la seule issue intéressante, viable. Celle qui donnait l’impression qu’on était sur la voie de la réussite. Pour moi et bien d’autres, nous étions d’ici, faits pour ici, nourris du ferment local. Partir c’était laisser dépérir une partie de soi. Je suis parti, mais je ne pouvais que revenir.


Dans le concert des nations comme on dit, il y a des pays très misérables, des pays pauvres, des pays à revenus moyens, des pays en voie d’émergence, des pays émergents, des pays développés, des pays très développés et des pays émirats. Le Cameroun n’est pas un pays pauvre. Pendant longtemps, nous fûmes un pays à revenus moyens. Depuis une dizaine d’années, nos récurrents problèmes de vol des biens publics, de corruption, de cupidité maladive, d’inadéquation des politiques publiques avec les exigences réelles de développement ont l’attention de la communauté nationale publique et privée, car il semble désormais évident aux yeux d’une majorité de leaders que nous n’avons pas le choix. Le pays est en danger. Il faut en être conscient et agir intelligemment.


Nous savons que nous ne vivons pas sur le dos d’une vache à lait ; le Cameroun n’a pas que des amis. Il faut construire sérieusement, sinon le chaos s’installera et il ne cessera de s’immiscer dans tous les pans de la société. Il n’y a pas de bâton magique lorsqu’on rentre dans la spirale infernale du chaos. Il y a les conflits, les assassinats, le développement de tous types de rapines, d’injustices et la multiplication des loups locaux ou étrangers aux crocs vifs, puissants et acérés, sans pitié qui profiteront de la décrépitude systémique chronique pour s’enrichir au détriment des enfants, des femmes, des jeunes et des vieux gens qui ne demandent qu’à vivre paisiblement une vie normale. Alors, il faut rentrer pour bâtir, chacun à son niveau.


Il est évident que tout le monde n’a pas le même niveau de résilience, de compétence, de détermination ou la volonté inébranlable de faire face coûte que coûte. Mais, chacun selon ses opportunités, ses possibilités, peut agir pour cette patrie qui est nôtre, le Cameroun. Notre Afrique en Miniature. Il faut rentrer bâtir, car nous sommes convaincus que le paradis s’il existe n’est pas ailleurs, mais ici. Il ne faut pas être naïf et penser qu’il est facile de s’établir ici. Les problèmes structurels, administratifs sont nombreux, les tares au niveau de certaines mentalités sont toujours très préoccupantes avec notamment cette vicieuse corruption endémique à toutes les échelles de la société, le népotisme, le clientélisme, l’affairisme, l’irrespect en milieu public ou professionnel, les harcèlements insidieux, le tribalisme idiot, l’intolérance violente, pernicieuse qui empêche la libération de toutes les énergies positives volontaires.


Mais il faut lutter. Nos pays sont régis par des espèces de logiques d’attraction Gravitationnelle Universelle connues des physiciens. Il faut une poussée initiale forte de la fusée du développement pour se retrouver hors des misères endémiques symbolisées par l’attraction terrestre, vers le bas. Cette poussée doit être puissamment alimentée par toutes les bonnes volontés conscientes, les compétences visibles et invisibles qui agissent pour qu’ici aussi, chacun puisse vivre normalement. Se soigner normalement, éduquer ses enfants normalement, trouver un emploi ou créer son business normalement, aller au stade, au cinéma ou au musée normalement, voyager normalement dans son village ou ailleurs dans tout le pays, gagner son argent normalement, se marier et fonder une famille normalement, vieillir normalement…


La normalité pérenne et structurelle exige des efforts intelligents, constants, consistants, cohérents ; beaucoup d’efforts ; mais le premier consiste pour celles et ceux qui sont ailleurs comme je le fus pendant 15 ans, à rentrer au pays. Il faut rentrer si on le peut. Le retour nécessite de préparer, de connaître le chemin. Il faut parfois le tracer soi-même quand il n’existe pas. Il faut s’informer, questionner, observer. Puis il faut prendre le bon chemin pour alimenter la fusée qui mettra le pays tout entier hors de portée des pesanteurs qui le font chuter et péricliter avec des conséquences néfastes sur l’éducation, la santé, la prospérité, la sécurité de tous et de chacun…

Quand on a été ailleurs, on a au minimum un double regard pertinent et conséquent sur les choses. Ce n’est jamais un inconvénient.


Serge Mbarga Owona

Mathématicien, écrivain, poète.